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  • Roseline Pendule

Les devoirs et le parent-allié

Dernière mise à jour : 21 janv. 2022


La rentrée est imminente et je pense à tous les enfants qui vont reprendre le chemin de l'école. Pour les plus jeunes, une nouvelle vie qui commence en découvrant la maternelle. Pour d'autres, la sensation quelque peu exaltante de "devenir un grand" en intégrant le CP, la 6eme ou la seconde. Pour les plus sereins, la hâte de retrouver les copains, la joie de découvrir de nouveaux professeurs et de nouvelles connaissances. Et pour d'autres, l'angoisse au ventre, la peur d'échouer, le retour à une cruelle réalité. Je l'avoue, c'est surtout à ceux-là que je pense.

Je travaille auprès d'enfants en difficulté scolaire depuis des années maintenant. Des petiots, des moyens, des très grands. Des petites lacunes aux gouffres de l'échec. Des humains aux profils hétéroclites. Cette année, mon activité sera réduite pour cause d'autres casquettes mais je n'oublie pas tout ce que j'ai vécu. Mon expérience fait ressortir depuis quelques jours ces pensées que je veux partager avec les parents.

La première chose, qui peut sembler étrange, mais je vous assure que c'est l'expérience qui parle : n'oubliez pas votre importance aux yeux de vos enfants. Remarquez bien que j'emploie le terme répété d'enfants et non d'élèves. Vos enfants sont enfants. Elèves à durée limitée dans un cadre donné qui n'est pas la maison ou la place autour de la table du dîner. Et vos enfants ont besoin de leurs parents. C'est idiot, dit comme ça alors je m'explique. Après leur journée de classe ou les jours de repos, nombreux sont les enfants et les jeunes qui suivent en plus des cours particuliers, du soutien, de l'accompagnement… Pour une matière précise, les devoirs réguliers, des troubles scolaires. Bien. Je n'ai pas l'intention de reprocher aux parents d'envoyer leurs enfants en classe ou de déléguer certaines choses concernant leur progéniture. Au contraire, cela peut contribuer à débloquer certaines situations ou permettre d'avancer davantage. Mon propos est clairement celui-ci : même avec les meilleurs professionnels du monde, votre enfant a d'abord besoin de vous.

Déléguer est une chose. Se désintéresser même inconsciemment en est une autre. Vous pourrez trouver la perle des écoles, la pépite des professeurs, la personne passionnée par ce qu'elle fait et intéressée par votre petit humain, si vous ne faites pas partie de la démarche, les limites seront vite là. Un enfant attend (même si c'est parfois bien enfoui au fond de son crâne) que les êtres les plus importants pour lui prennent en considération ce qu'il pense, son ressenti, ses difficultés. Pas du soutien scolaire en double dose. Juste du soutien. Ce qui entraîne le deuxième sujet : votre point de vue.

Alors, ça y est, je perçois quelques sourires en coin : "Ah, bah, elle est gonflée celle-là, non seulement elle nous dit quoi faire avec nos enfants et en plus, elle nous ressort le refrain du laxisme et du copinage". Eh bien, non ! Ni l'un, ni l'autre. Je ne veux donner de leçons à personne. Je partage un peu de vécu. Et je ne milite pas pour le parentage permissif. Je parle de point de vue par rapport aux devoirs et obligations scolaires qui ont tendance à pourrir le quotidien de nombreuses familles. Et pour que ça se passe mieux. Et là, oui, j'espère, un peu, susciter la réflexion. Car, sans se mentir, que se passe-t-il souvent lorsqu'un enfant rencontre quelques difficultés en classe ? Quand vient l'heure des devoirs ? La réponse (honnête et qui n'a pas besoin d'être culpabilisante) est simple : le parent accompagnateur, dévoué, aimant, prêt-à-tout-pour-la-construction-d'un-humain-équilibré-dont-il-a-la-charge-jusqu'à-bon-port-quitte-à-endosser-le-désagréable-rôle-de-rabat-joie-empêcheur-de-s'amuser, se transforme en professeur supplémentaire qui ne comprend pas qu'il soit si compliqué de terminer ces fichus devoirs afin qu'il puisse vaquer à la préparation du dîner.

Et là, en général, les difficultés que l'on voudrait tant éviter ne font que commencer. D'où l'importance de votre point de vue.

Des professeurs, l'enfant en a déjà (trop à son goût). Des jugements, s'il ne vit pas sur une île déserte, il en entendra aussi (bien assez). Mais, des parents ? Il n'en a pas d'autres et rien d'équivalent. Jamais. Alors que ressent un enfant quand son parent se fâche, perd patience, juge le travail scolaire ? Il se sent seul. TOUT SEUL. Sans allié. Que des adultes hostiles accros à la note. Et vous me direz : "c'est bien normal, il faut bien qu'il réussisse dans la vie." J'entends. Je réponds : Connaissez-vous un seul enfant qui n'ait pas envie de réussir ? "Moi, plus tard, je voudrais être chômeur à vie ou habiter dans un carton", vous l'entendez souvent ? Quant à l'enfant déjà en difficulté ou à l'ado perdu dans ses hormones dont l'unique leit-motiv se résume à "Ch'ais pas", c'est une autre histoire.

Un enfant a forcément envie de réussir, d'avoir des tas de choses, d'aller vers la vie qui lui semble parfaite, dans une yourte ou un château mais en tous cas, d'avoir tout en main pour y arriver. Et si votre but est de faire en sorte que cela se réalise alors il faut vous questionner sur votre point de vue. Et, encore une fois, il ne s'agit pas d'arriver à "fais ce que tu veux, c'est génial." Non. Les devoirs sont là et il faut les faire et on pousserait même le bouchon jusqu'à vouloir qu'ils soient bien faits et utiles dans la progression. L'interrogation est alors : est-ce que je suis le professeur de mon enfant transmetteur de pression à la note ou est-ce que je suis l'allié de mon enfant et je lui apporte mon aide pour notre but commun : sa vie épanouissante et sécure.

Dans ce cas, tout peut changer. Pas de jugement mais de la complicité. Pas de réprimandes mais la mise en pratique d'outils et de méthodes pour arriver à la compréhension. Pas de soupirs de lassitude, mais des congratulations partagées à chaque marche franchie…

"Et pourquoi faire tous ces efforts ?", "ça demande plus de temps, plus d'énergie, et nous aussi on a déjà notre journée sur le dos, et puis, c'est quand même pas compliqué de faire ce qu'on lui demande du premier coup, hein ?" Bah, si, justement. Si l'enfant a des difficultés, c'est qu'il y a une raison. TOUJOURS. Tous ces efforts, ce temps, risquent de n'aboutir qu'à une meilleure entente familiale, à moins de soucis scolaires, à moins de stress à propos des devoirs, à plus de plaisir d'apprentissage, à plus d'investissement, donc à plus de chances de parcours scolaire serein…

Alors, être parent-allié, ça vaut le coût, non ?

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